Macron et Hamon : enjeux et risques de leurs propositions pour la zone euro

23 Mars 2017 COP 21
Les deux candidats à l’élection présidentielle et anciens membres du gouvernement, Benoît Hamon et Emmanuel Macron, semblent avoir des propositions similaires pour l’Europe. En apparence seulement.
Un récent sondage confirme l'attachement de deux tiers des Français à l'Union européenne et à la zone euro, mais ce sujet reste étonnamment absent du débat présidentiel.
Parmi les candidats susceptibles de l'emporter, l'un se contente de réduire les compétences de la Commission européenne, tandis que deux autres envisagent l'abandon de la monnaie unique. Seuls deux d'entre eux portent un véritable discours pro-européen : Benoît Hamon et Emmanuel Macron.
Le premier vient d'enrichir son programme avec le concours de quelques économistes et juristes réputés et celui-ci comporte désormais une proposition présentée comme une avancée inédite : un parlement de la zone euro. Pourtant, c'est exactement ce que l'on trouve dans le programme du second, et ce, depuis déjà un certain temps !
Bien sûr, le diable est dans les détails et il est dommage que les joutes télévisées n'aient pas permis d'en comparer véritablement les contenus. Deux questions semblent essentielles.

L'aveu d'un échec

Faut-il constituer une assemblée de la zone euro à partir d'un sous-ensemble du Parlement européen ou en la constituant majoritairement de députés nationaux ?
La seconde orientation, retenue par le candidat socialiste, est une forme de camouflet à la construction progressive d'une démocratie européenne depuis 1952. Est-ce une réponse adéquate à la désaffection dont souffrent ces élections ?
De fait, celles-ci sont considérées depuis les travaux de Reif et Schmitt en 1980 comme des élections de « second ordre » où les citoyens votent pour des motifs essentiellement nationaux.
La hausse régulière des pouvoirs dévolus à ces parlementaires n'a pas empêché l'effondrement du taux de participation, passé de 62 % à 42 % en trente ans. Comment renforcer le lien entre l'Europe politique et ses citoyens ?

Un système électoral mieux adapté

Plutôt que de s'en remettre à des députés nationaux, il semblerait plus judicieux de conserver nos députés européens, comme le suggère le candidat d'En marche, mais en choisissant un système électoral mieux adapté.
Retenir par exemple un scrutin à « liste ouverte » où les électeurs votent à la fois en faveur d'une liste et individuellement pour des candidats au sein de cette liste, à l'instar de ce qui est déjà mis en place dans certains pays membres. On peut également espérer que des élections seront davantage mobilisatrices et sujettes à débat si elles permettent de désigner directement un ministre ou un président de la zone euro.

La relance par l'investissement

Quel « pouvoir renforcé » conférer à ce nouveau parlement ? Cela suppose un budget, donc un impôt : une partie de la TVA ou de l'impôt sur les sociétés. Benoît Hamon semble opter pour la seconde option, Emmanuel Macron ne se prononce pas.
Ce budget permettrait de s'endetter pour mener des politiques de relance par l'investissement. Il peut aussi conduire à la mise en place progressive de mécanismes de « stabilisation » automatique, comme une assurance-chômage européenne soutenant les pays en récession.

Le danger de faire sauter les verrous européens

Au-delà, la question à court terme reste la dette, notamment celle de la Grèce. Il aurait fallu l'annuler et en faire supporter le coût aux banques qui la détenaient, quitte à ce que les contribuables - notamment allemands, et français - paient pour renflouer leurs banques.
De peur que cela ne provoque un effondrement du secteur financier, l'Europe a préféré la faire changer de mains : celle-ci est désormais détenue par les contribuables européens et la population allemande refuse de payer.
Pour autant, faire sauter les verrous européens - les droits de veto sur le mécanisme de résolution par exemple - et régler cela par un vote démocratique, comme le propose Benoît Hamon, serait à la fois dangereux sur le plan économique et inacceptable pour nos partenaires allemands.
Comment imaginer un système de mise en commun de ressources où une majorité peut régulièrement demander à la minorité de payer pour ses dettes ? Qui sera prêt à financer un tel collectif ? L'annulation de la dette grecque doit être négociée directement, pas au travers d'un tel jeu de dupes...
 

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